Après la série De Profundis en 2012, l’idée est venue Thierry Esther de nettoyer ses œuvres avec de l’eau de javel, de l’ammoniaque, de l’acide, pour leur donner une deuxième vie tout en propreté.
Sur la toile « déjeuner à l’eau de javel, » on peut apercevoir de la poudre de marbre brossée sur de la poudre d’aluminium, elle-même mélangée à une dose d’acide. L’ensemble est recouvert de deux doses d’eau de javel. L’artiste récure la toile avec une brosse ou une éponge métallique. A chaque passage de la brosse, l’eau de javel lave et redonne de la propreté à son œuvre et l’outil dépose une fine particule de poudre diamantée sur la surface.
Une fois la matière essuyée, les sens délayés, le dessin effacé, que reste-t-il de ses toiles après nettoyage ? Il ne retrouvera jamais la blancheur de l’œuvre du départ, il ne sera jamais satisfait de la finition de sa propreté.
Il a travaillé sur des représentations de murs délabrés, des trottoirs abîmés, des rues dégoudronnées, toute cette saleté qui nous enivre toute une vie, avec ses vapeurs et ses odeurs… La rue crasseuse s’invite dans l’art propre.
L’artiste garde les vêtements qu’il utilise pendant le façonnage de ses toiles. Il en a conservé les tâches d’encre, d’acide et de poudres diverses pour en faire une sculpture.
En plus des toiles et de la structure, Thierry Esther échantillonne les produits utilisés pour nettoyer et refaçonner ses toiles dans des tubes à essai pour en exposer les interactions chimiques ; des résultats parfois esthétiquement troublants.